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Notes sur la théorie et pratique de la médiation culturelle, Notes de Langages de programmation

Notes de sciences du langage sur la théorie et pratique de la médiation culturelle. Les principaux thèmes abordés sont les suivants: La notion de culture, La notion d’aire culturelle, la socioculture.

Typologie: Notes

2013/2014

Téléchargé le 12/02/2014

Thierry_E
Thierry_E 🇫🇷

4.6

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515 documents

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Télécharge Notes sur la théorie et pratique de la médiation culturelle et plus Notes au format PDF de Langages de programmation sur Docsity uniquement! 1 E33 SLMC 1 Résumé du cours THÉORIE ET PRATIQUE DE LA MÉDIATION CULTURELLE CM 2010 - 2011 Bernard TABUCE AUX ÉTUDIANTS : CECI N’EST QU’UN RÉSUMÉ DU COURS ET N’EST DIFFUSÉ QUE POUR VOUS AIDER DANS VOS RÉVISIONS. L’enseignant, Bernard Tabuce – novembre 2010 2 PREMIERE PARTIE RAPPEL DES TERMES « CULTURE » ET « MEDIATION » I. La notion de culture 1. Les sciences sociales utilisent le mot « culture » pour parler  d’identité : identité culturelle ;  du patrimoine hérité : patrimoine culturel, voir : les journées du patrimoine ;  des productions littéraires et artistiques, qu’il s'agisse de « culture cultivée » ou de « culture populaire ». On parle aussi de « culture pub » ;  des productions matérielles ancestrales, traditionnelles, artisanales ;  de symboles et autres représentations propres à des groupes humains. Les sciences sociales utilisent aussi le mot « culture » dans des expressions comme : Culture d’entreprise, cultures dominantes et cultures dominées, contre-cultures et cultures contre, culture jeune, culture de loisirs, etc. Culture : tout ce qui est produit par l’homme dans le cadre social. Culture désigne aussi la formation spirituelle. Le concept ethnologique de culture selon Tylor : « Culture ou civilisation, pris dans son sens ethnologique le plus étendu, est ce tout complexe qui comprend la connaissance, les croyances, l’art, la morale, le droit, les coutumes et les autres capacités ou habitudes acquises par l’homme en tant que membre de la société. » Tylor, Primitive culture trad. fr. La civilisation primitive, 1871 Boas et le respect de la différence Il affirme le principe de la dignité de chaque culture. Chaque culture mérite considération et respect. Principe de la tolérance. Pour Boas, « chaque culture exprime une façon unique d’être homme, elle a droit à l’estime et à la protection, si elle est menacée » D. Cuche, p. 22 Malinowski propose le fonctionnalisme, centré sur le présent d’une culture. (1944-45) Parce que, d’après lui, c’est ce seul présent auquel l’anthropologue a accès. Problème de sa théorie : il sous-estime les tendances au changement interne propres à chaque culture, le changement d’après lui ne peut être produit que par la rencontre avec un extérieur. Il élabore une théorie qui sera très controversée, celle des « besoins ». 2. La notion d’aire culturelle Notion désignant les espaces géographiques où sont diffusés les mêmes éléments culturels 5 4. Pierre Emmanuel et sa définition de la culture Il distingue: la culture humaniste la culture sociale la culture idéologique  Jean-Michel Djian, La politique culturelle, Le Monde-Editions, 1996. 5. L’auberge espagnole « La culture est devenue une vaste auberge espagnole où, désormais, chacun peut trouver la réponse mystificatrice qu’il attend de son sort. » (DJIAN) « La barbarie a fini par s’emparer de la culture. » « Ce sont le sport, la mode, le loisir qui forcent les portes de la grande culture. » (FINKIELKRAUT) Certains chercheurs canadiens définissent la culture par « secteurs » culturels 6 « Cette vision extensive, qui relève à l’évidence du « tout- culturel », a le mérite de tenir compte à la fois des différents types de pratiques de loisirs, des nouvelles technologies de diffusion, des divers lieux de formation et des diverses subcultures ou composantes socioculturelles. » (MOULINIER, op. cit.) Ainsi, on distinguera LA CULTURE et LE CULTUREL LA CULTURE LE CULTUREL ACCEPTION TRES LARGE, correspondant approche de l’Unesco sur les politi- ques culturelles(1982). ACTIVITES ORGANISEES : DES ARTS AUX LOISIRS, DES MEDIAS AUX SPECTACLES, ETC. La culture doit être considérée comme l’ensemble des traits distinctifs spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social et qu’elle englobe, outre les arts et les lettres, mes modes de vie , les façons de vivre ensemble, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances. « DEFINITION EXTENSIVE QUI N’EST PAS CELLE DU MINISTERE DE LA CULTURE ». Moulinier1 CONCEPTION « FRANÇAISE » « La politique culturelle de la France refuse cette approche est s’appuie sur la définition 1 op. cit., p. 22. Secteur Dont - Culture artistique Musique, opéra, ballet, théâtre, littérature,peinture, sculpture, tissage, etc. - Culture ethnique ou populaire Festivals, arts et artisanat nationaux, célébrations collectives, etc. - Culture liée aux médias Presse, édition, radio, télévision, cinéma, disques et enregistrements, etc. - Culture récréative Chasse, pêche, motoneige, camping, natation, football, hockey, base-ball, parcs et réserves naturelles, etc. - Culture liée à l’éducation Enseignement primaire et secondaire, enseignement technique, universités et collèges communautaires, éducation des adultes, cours de vulgarisation, etc. - Culture sociale Pubs*, cafés, clubs, organisations d’entraide, associations bénévoles, associations d’anciens militaires, etc. *Public houses, selon la tradition anglo-saxonne (note de B.T.) D’après le texte de Pierre Moulinier, p. 23 7 étroite du mot culture, à savoir, selon André Comte-Sponville, “la partie la plus élevée de la civilisation” Moulinier, p. 23. « Le culturel » vu par Michel de Certeau en 1974 Dans le langage, « la culture » devient un neutre : « le culturel ». C’est le symptôme de l’existence d’une poche où refluent les problèmes qu’une société a en reste, sans savoir comment les traiter. Ils sont gardés là, isolés de leurs liens structuraux avec l’apparition de nouveaux pouvoirs et avec les déplacements survenus dans les conflits sociaux ou dans les localisations économiques. On en vient donc à supposer à la culture une autonomie indifférenciée et molle. Elle se caractérise comme un non-lieu où tous les remplois sont possibles, où peut circuler le « n’importe quoi ». Quand il ne s’enferme pas dans la statistique et la précision analytique des données, le discours culturel tombe dans les généralités et remploie les résidus doctrinaux (politiques, philosophiques, religieux). Ce discours universel est le musée où l’on recase quelques concepts extraits de systèmes qui avaient jadis leur rigueur (« humanisme », etc.). L’idéologie resurgit ainsi, subrepticement, dans le culturel – une idéologie bricolée, un sac idéologique, mais qui annonce sans doute autre chose. La politique dite culturelle est elle-même souvent la victime de cette neutralité – malgré les études et les appareils dont elle dispose - quand elle découpe une « dimension » culturelle abstraite dans l’organisation de la société pour la traiter à part. C’est une « politique » étrange, car les problèmes politiques en sont effacés. Elle fait « comme si » (par ailleurs, on sait que ce n’est pas vrai) on pouvait esquiver le prix global à payer pour tout changement dans quelque secteur que ce soit. La culture au pluriel Ainsi, on précise en distinguant CULTURE CULTURE LEGUEE Gestion des œuvres du patrimoine CULTURE AGIE Education et démocratisation culturelle CULTURE ACTIVE Pratiques amateurs, créativité individuelle et création artistique L’évolution du concept de culture et la définition donnée par l’État déterminent la politique culturelle. La politique culturelle est de la compétence de l’État et des collectivités territoriales. 10 • L’espace public est le « lieu dans lequel je peux prendre conscience de mon appartenance collective l’espace public est le lieu dans lequel s’expriment et se manifestent les formes collectives de la sociabilité. L’espace public est voué à des usages sociaux ». Les espaces publics sont fondateurs. L’agora et le théâtre en témoignent dans l’Antiquité grecque : « ils constituent, l’un et l’autre, les lieux dans lesquels s’expriment la dimension institutionnelle et la dimension esthétique de l’appartenance et de la sociabilité. » 4. Animation culturelle vs animation socioculturelle  A. Chante, op. cit.,questions 63 et 64. 5. La fin du socioculturel ? A l’heure actuelle, les termes animation socioculturelle, socioculturel sont désuets, l’action culturelle semble bien dépassée. Les objectifs de l’action culturelle étaient des objectifs sociaux, ils sont obsolètes, comme le dit Jean Caune : 11 Jean Caune, La culture en action, PUG, 1992, pp. 18-19 Moulinier est, lui aussi, très explicite 5: 5 op. cit., p. 26. 12 III. UN CONCEPT EMERGENT : LA MEDIATION CULTURELLE 1. Médiation par, de, pour la culture LIRE LA QUESTION 45 (A. Chante) 2. Bernard Lamizet : « La culture se donne à voir par la médiation » « Par la culture, les pratiques sociales singulières deviennent des pratiques collectives: elles s'inscrivent dans des manifestations et des représentations collectives de la sociabilité, et, dans ces conditions, elles deviennent effectivement des médiations, puisqu' elles engagent des pratiques singulières (spectateurs, acteurs, auditeurs, lecteurs, etc.) dans des formes collectives de représentation de l’appartenance sociale et culturelle (spectacles, musique, livre, etc.). Une fois mise en œuvre dans la réalité de l’espace public, la médiation donne à la culture une consistance perceptible et la matérialité sensible d'une prestation réelle, dans l’espace, avec ses costumes, ses sonorités, sa mise en scène et ses décors. Tandis que l’existence d'un sujet singulier se manifeste, pour l'autre, au cours de l'expérience du miroir, et tandis que l' existence des formes politiques de la médiation se manifeste, pour ceux qui y sont soumis, par la mise en œuvre effective de la réalité de l'exercice d'un pouvoir, l’existence de la médiation culturelle se manifeste, pour ceux qui la partagent ou s' inscrivent dans les lieux et dans les structures de l' appartenance et du pacte social qu' elle représente, par la mise en œuvre esthétique de prestations, d'activités ou de représentations qui ont la matérialité de signifiants et la consistance d’événements. La culture se donne donc à voir par la mise en œuvre effective de la médiation qu' elle constitue, ce qui renvoie à l' existence même de l' espace public et à sa raison d'être dans la cité et dans l’espace politique. Tandis que l'espace privé se définit, dans le droit et dans les formes de la sociabilité, par l’acteur singulier à qui il appartient (je suis chez quelqu'un), l’espace public, qui ne saurait, au contraire, être la propriété de quelqu’un, puisqu'il est indistinct, se définit par la mise en oeuvre de pratiques collectives (manifestations, marché, cérémonies de toutes sortes), ou par la mise en oeuvre de pratiques représentant la collectivité et l'appartenance collective par la médiation d'une mise en scène et d’une représentation esthétique. La médiation culturelle donne à voir les formes de l'appartenance sociale en en faisant les objets et les structures d'une représentation devant le public, ainsi constitué par le fait même d’assister à la représentation : en assistant ainsi à la représentation de sa propre appartenance, le public prend conscience de sa propre sociabilité, et, par conséquent, les citoyens, les membres singuliers de la collectivité, prennent, de la même manière, conscience de leur appartenance, de leur statut et des lois que celui-ci leur impose. La médiation culturelle est donc bien plus qu'une structure institutionnelle, elle est bien plus qu’une organisation des formes de la culture et de la communication : de la même manière que la médiation du miroir est l'instance par laquelle nous prenons singulièrement conscience de notre identité par la médiation symbolique de l'image de l'autre, la médiation culturelle constitue l’instance par laquelle nous prenons pleinement conscience de notre appartenance par la médiation esthétique d'une représentation. » Bernard Lamizet., op. cit., p. 15-16 3. Moles : la sociodynamique de la culture Lire l’explication de A. Chante, op. cit. Je donne ci-dessous le schéma publié par Moles 15 Jean-Philippe Lecat Ancien député de la Côte d'Or, Jean-Philippe Lecat crée une " Direction du patrimoine " à la suite du transfert au ministère de l'Environnement et du Cadre de vie d'une partie des attributions de l'ancienne direction de l'architecture, et il lance " l'Année du Patrimoine " (1980). Il fonde le Conseil et la Mission du patrimoine ethnologique. L'établissement public du Musée d'Orsay est créé en 1978, celui de La Villette en 1979. Il fait voter la Loi sur les Archives de 1979. Une "Délégation à la création, aux métiers artistiques et aux manufactures " regroupe en 1979 l'ensemble des questions relatives aux arts plastiques. Un second Conservatoire national supérieur de musique est créé à Lyon. Une " mission du développement culturel " et un " service des affaires internationales " voient le jour en 1979. En matière de communication, il fait adopter la Loi du 27/07/1978 sur la radio-diffusion et la télévision. Jack Lang Augmentation du budget, élargissement de son champ d'action à de nouvelles formes d'art, insertion dans le monde économique, développement de l'audiovisuel. Les Grands Travaux (Arche de la Défense, Opéra Bastille, Grand Louvre, Bibliothèque Nationale,...).Le budget du ministère est doublé en 1982 niveau, passe de 2,6 milliards de francs en 1981 à 13,8 milliards en 1993. Cette croissance budgétaire, à un rythme double de celle de l'Etat, touche tous les domaines : monuments historiques, recherche, décentralisation théâtrale, archéologie, musées (création de 22 fonds régionaux d'acquisitions pour les musées), arts plastiques (création de 22 fonds régionaux d'art contemporain). Une politique de contrats et de conventions Etat-collectivités territoriales est relancée au rythme d'une centaine chaque année. Une modernisation des équipements culturels est perceptible à l'échelle du territoire national. Plusieurs grandes institutions de formation sont créées ou rénovées : École nationale du Patrimoine, Institut des hautes études cinématographiques, les deux Conservatoires nationaux supérieurs de musique (Paris et Lyon), l'École du Louvre,... En 12 ans, plus de 8 000 postes sont créés dans le domaine culturel.L'éducation artistique en milieu scolaire se modernise, de nouvelles disciplines sont enseignées (théâtre, cinéma, histoire des arts,...), des opérations de sensibilisation se développent pour les enfants : classes culturelles, collège au cinéma, classes du patrimoine,... Le champ d'action du ministère s'élargit à d'autres formes d'art : chanson, jazz, arts de la rue, mode, design, création industrielle, tandis que se créent de nouveaux lieux de diffusion (Centre national de la Chanson, Festival International de Bande Dessinée, ...). Tenant compte de la modernité économique, et du développement de la "culture d'appartement", grâce aux bonds en avant de l'électronique le ministère est conduit à se préoccuper davantage des industries culturelles (livre, disque, cinéma, audiovisuel) dans un souci de régulation du marché (mécanisme d'aides à l'industrie cinématographique, prix unique du livre, quotas de diffusion de chansons francophones à la radio,...). Ce rapprochement culture-économie se traduit également par l'encouragement au mécénat (incitations fiscales). Cette époque sera aussi celle des mutations dans le paysage audiovisuel : multiplication des chaînes, privatisation d'une partie du secteur public, ouverture des ondes, instauration d'institutions de régulation. 16 DEUXIEME PARTIE : CULTURES, GROUPES, MONDIALISATION, MONDIALITE I. CULTURE – INTÉGRATION- ASSIMILATION Introduction Denys Cuche signale que la culture est avant tout une production historique, « une construction qui s’inscrit dans l’histoire ». Plutôt que de considérer qu’une culture serait le résultat d’un groupe pris isolément, l’auteur préfère montrer l’importance des relations intergroupales, et de l’histoire de ces dernières. L’approche des cultures doit ainsi se faire en diachronie et en synchronie. Deux pistes, deux approches possibles : 1° On peut étudier une culture en diachronie, compte tenu de son évolution, de son histoire. Ex : « Evolution de la culture française »… 2° On peut étudier une culture en son état actuel, « ici et maintenant ». On peut l’étudier dans ses rapports actuels avec d’autres cultures, sans considérer l’intervention du temps. Ex : « Le multiculturalisme en France aujourd’hui ». Une culture se présente à la fois en synchronie et en diachronie. A tout moment de son histoire, une culture est en évolution. Vue en synchronie, une culture présente des traits, des caractéristiques hérités du passé, d’un état, d’états antérieurs, mais aussi des aspects qui amorcent (annoncent) des modifications à venir. Jakobson a entrevu pour les langues (c’est aussi valable pour les cultures) une sorte de panchronisme où les dimensions synchroniques et diachroniques viendraient à se rejoindre. « Ce qui est premier, historiquement, c’est le contact, ce qui est second, c’est le jeu de la distinction qui produit des différences culturelles. » Cuche C’est ce que j’appelle le conflit mimétique culturel: chaque culture a conscience de sa spécificité, qui est vitale pour elle. Chaque culture produit de la différence pour convaincre autrui, mais aussi pour se convaincre soi-même de son originalité. Chaque groupe veut croire et faire savoir qu’il a un modèle culturel propre et distinct de celui d’autrui. B. Tabuce, A la découverte des bandes dessinées occitanes, MARPOC/FEDEROP, 1986. La notion de conflit mimétique a été largement analysée par René Girard. (étude des mythes) Toutes les cultures s’élaborent dans le cadre de rapports sociaux. Cuche rappelle que tous les rapports sociaux sont inégalitaires. Les hiérarchies sociales sont à l’origine des hiérarchies culturelles. Ainsi, on peut, afin de demeurer dans notre cadre, signaler qu’une culture est plus ou moins fortement médiatrice selon qu’elle est la culture de la classe dominante ou bien d’une classe dominée 17 Même si ce n’est pas forcément de droit, il n’y a pas, de fait d’égalité entre les cultures. Les cultures n’existent pas indépendamment les unes des autres. Elles existent les unes par rapport aux autres, comme les classes sociales existent les unes par rapport aux autres. Certes, les déclarations officielles (dont celle de l’Unesco précitée) rappellent que toutes les cultures méritent les mêmes égards. Et toutes méritent des actes de médiation (toute culture a besoin de médiation). Mais force est de constater que toutes les cultures ne sont pas socialement reconnues de même valeur. Cuche envisage une approche « polémologique » (polemos = guerre) des cultures. Les cultures (Cuche, p. 68), « se développent dans la tension, parfois dans la violence». Cette lecture des rapports interculturels est séduisante, mais très réductrice, comme le signale Cuche. L’erreur consiste à croire que le plus faible ne peut que se voir imposer la culture du plus fort. Certes, il y a toujours inégalité de positions dans les champs social, politique, économique et culturel. Donc, dans un pays donné, ou bien dans un système supranational comme l’Europe, il y a des situations de force ou de faiblesse culturelle relatives. Ce qui n’implique pas qu’une culture dominée se trouve sans atouts : « même le plus faible ne se trouve jamais démuni dans le jeu culturel » (Cuche, p. 69). Une culture, dite dominée n’est pas nécessairement écrasée ou dépendante. Dans son évolution, une culture dominée est nécessairement soumise aux influences d’une culture dominante. Mais une culture, pour dominante soit-elle, subit des influences plus ou moins fortes, de la culture (ou des cultures) dominée(s). Ajoutons qu’une culture dominée peut résister à la culture dominante. Aucune culture ne peut s’imposer, se substituer totalement à une autre culture. Aucun groupe social ou ethnique ne peut s’imposer totalement à un autre groupe. L’humanité produit en permanence de la différence. Le concept d’évolution des cultures implique que rien n’est totalement gagné ni perdu pour toujours. Certaines cultures plient, s’adaptent, imitent les autres cultures, mais sans rompre pour autant. Un autre aspect mérite qu’on s’y arrête : le contact entre cultures peut être dynamisant. En effet, une culture dominante peut changer au contact des cultures qu’elle domine ; une culture dominée peut éventuellement, au contact de la culture qui la domine, puiser de quoi se reconstruire et perdurer… Cuche rapproche culture dominée et culture populaire : « Evoquer la question des groupes dominés, c’est inévitablement évoquer le débat autour de la notion de “ culture populaire”. Au XIX° siècle, les folkloristes se sont intéressés aux traditions populaires, singulièrement aux traditions paysannes. Au XX° siècle, de nombreux projets culturels s’attachent à servir la cause des cultures populaires, cultures dominées. Deux théories s’affrontent en la matière, qu’on va essayer de montrer. Deux thèses en opposition: a) La thèse qui conduit au mépris des cultures populaires. b) A l’opposé, il y a des gens qui considèrent que les cultures populaires sont authentiques, qu’elles peuvent être égales ou même supérieures à la culture dominante, à la culture cultivée des classes sociales dominantes, culture élitiste. Après avoir exposé ces deux thèses opposées, je propose une mise au point : La culture populaire, « culture de consommation » Avertissement : il ne s’agit pas de dire ici que les peuples ne peuvent que consommer les 20 2. Intégration ? Assimilation ? Ce qui vient d’être dit montre que l’on peut en venir à imaginer des événements culturels (outre d’autres interventions concomitantes) visant à RELIER une minorité culturelle à une majorité. Etant bien entendu que la minorité devrait peu à peu devenir semblable à la majorité et que les minoritaires/marginaux doivent se fondre dans une société dont ils doivent accepter les règles, donc la culture. Par la culture diffusée sur le mode de la démocratisation de la culture. D’où l’idée de culture comme médiateur conduisant a une intégration. Intégrer : incorporer un élément à un ensemble. Politique intégrationniste où un individu ou un groupe doit « faire corps », « entrer dans » le groupe majoritaire. Intégration : ce mot fait aussi, par association d’idées, penser à assimilation. Assimilation : D’abord «rendre semblable à ». Il s’agit de l’intégration (d’un élément humain) à un groupe social, national, ethnique, etc. Mais, à l’heure actuelle, ce modèle semble bien ne plus avoir cours. Dans de nombreux pays on s’efforce maintenant de dégager une sorte de « supra identité » qui respecterait toutes les diversités ethniques et culturelles. Serait alors prise en compte une hétérogénéité de fait des sociétés contemporaines, indépendante des « modèles » nationaux de gestion de la diversité ethnique et culturelle. La médiation culturelle - comprendre : « le travail des médiateurs culturels » - dépendant désormais de cet état de fait. On va voir comment Marco Martiniello dit qu’on peut « sortir des ghettos culturels ». Marco Martiniello, Sortir des ghettos culturels, Presses de Sciences Po, Paris, 1997 3. Les « modèles » nationaux et leurs incidences sur la médiation culturelle. Martiniello: « Si toutes les sociétés humaines sont hétérogènes, chacune d’entre elles présente une configuration particulière de la diversité culturelle et identitaire. » Il convient de distinguer les deux types d’hétérogénéité culturelle : « Kymlicka distingue deux types de sociétés multiculturelles : les sociétés « multinationales » et les sociétés « polyethniques ». Dans les premières, la diversité culturelle et identitaire résulte principalement de l’incorporation d’identités culturelles préexistantes dans un nouvel Etat . ce dernier est ainsi composé d’un groupe variable de groupes nationaux, souvent qualifiés de minorités et de majorités nationales. Dans les sociétés « polyethniques », la diversité culturelle résulte plutôt d’un processus de migrations massives qui donne naissance à la formation de groupes ethniques. Ces derniers ne sont pas perçus comme étant à l’origine de l’Etat et constitutifs de la nation. Cette typologie est incomplète dans la mesure où certains groupes, par exemple les Noirs américains, ne peuvent pas y trouver place. Elle permet néanmoins d’appréhender une partie de la réalité multiculturelle faite d’identités multiples au sein des sociétés humaines. » Martiniello, op. cit., P. 47-48. Des oppositions binaires historiques, deux projets de société opposés 21 Assimilationnisme Universalisme Individualisme Egalitarisme Pluralisme Particularisme Communautarisme Différentialisme « Modèle » assimilationniste « à la française » « Modèle » pluraliste « à l’anglo-saxonne » Evacuation de la question de la diversité culturelle, de la diversité ethnique, de la diversité religieuse. Les citoyens ayant les mêmes droits et les mêmes devoirs: EGALITE. Juxtaposition de communautés ethniques et culturelles en compétition, voire en conflit pour le contrôle du, des pouvoir(s). Les identités communautaires priment sur l’identité nationale. INEGALITE des droits selon l’appartenance Martiniello dénonce ce schéma qu’il juge trop caricatural, simplificateur. Il démontre que ceci ne correspond à aucune réalité. En effet, on observe : Des tendances au pluralisme dans des sociétés à modèle assimilationniste ; Des tendances assimilationnistes dans les sociétés à modèle pluraliste. « La France est plus multiculturaliste qu’elle veut bien l’admettre (…)la Grande-Bretagne est plus assimilationniste qu ‘elle ne le prétend. » ( Martiniello p. 62). Alors que le « modèle » français, assimilationniste, ne saurait tolérer la mise en scène des particularismes et autres identités minoritaires, la monstration institutionnalisée des racines fait partie du paysage touristico-culturel contemporain. On peut appeler cela le multiculturalisme « soft » ou « light ». 22 © Bernard Tabuce 25 Ce qui relève de la haute technologie, c’est la consommation de masse éphémère, sans cesse renouvelée. A la notion de culture identificatrice, Warnier ajoute celle de culture-boussole. La culture, boussole d’une société, est l’instrument symbolique sans lequel nul ne saurait d’où il vient, ni comment il convient de se comporter dans le groupe. Tous les groupes ne disposent pas d’une seule et unique « boussole ». Il y a des cultures fondées sur la seule tradition, celles de groupes dont la vie n’a pas (encore) été affectée par la haute technologie. Une boussole unique, qui se transmet de génération en génération. Ce qui n’empêche pas des changements. Il y a les cultures qui, en plus d’être fondées sur la tradition, sont puissamment marquées par le phénomène industriel. Les cultures sont diverses, enracinées. Ce qui contraste avec la diffusion planétaire des biens et des produits culturels de l’industrie. Là, rien n’est ancré, localisé, spécifié. Ce système est générateur de l’ethnocide* : il tue les cultures locales, singulières. *Ethnocide est différent de génocide. Voir cours L1. 2. Sur l’ethnocide et sur la résistance. Le global et le local. - Deux théories, deux mots pour exprimer des chemins différents : convergence et différence. (explication) - Remarque sur l’érosion des cultures singulières. - Sur le local et le global. (cours) Le concept de résistance EXPOSÉ DES TROIS ARGUMENTS (cours) Le point de vue des pessimistes Le point de vue des postmodernes 26 Le troisième argument concerne les technologies modernes. 3. Sur la diversité culturelle La Conférence générale adopte la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles 20-10-2005 7:00 pm La Conférence générale de l’UNESCO, réunie à Paris du 3 au 21 octobre, a approuvé aujourd’hui (par 148 voix contre 2, 4 abstentions) la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles*, un instrument juridique international qui entrera en vigueur trois mois après sa ratification par 30 Etats. Fruit d’un long processus de maturation et de deux années d’intenses négociations, jalonné de nombreuses réunions d’experts indépendants, puis gouvernementaux, ce texte qui revêt la forme d’un instrument juridique international, renforce l’idée qui figurait déjà dans la Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle**, adoptée à l’unanimité en 2001, à savoir que la diversité culturelle doit être considérée comme un « patrimoine commun de l’humanité » et sa « défense comme un impératif éthique, inséparable du respect de la dignité de la personne humaine ». En 2003, les Etats membres demandaient à l’Organisation de poursuivre son action normative pour défendre la créativité humaine, une composante très importante de la Déclaration telle qu’énoncée dans ses articles 8 à 11. La Convention vise à réaffirmer les liens qui unissent culture, développement et dialogue et à créer une plate-forme innovante de coopération culturelle internationale. A cette fin, elle réaffirme le droit souverain des Etats d’élaborer des politiques culturelles en vue de « protéger et promouvoir la diversité des expressions culturelles », d’une part, et de « créer les conditions permettant aux cultures de s’épanouir et interagir librement de manière à s’enrichir mutuellement », d’autre part (article premier). Ce faisant, une série de principes (article 2) garantit que toute mesure destinée à protéger et à promouvoir la diversité des expressions culturelles n’entrave pas le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales « telles que la liberté d’expression, d’information et de communication, ainsi que la possibilité pour les individus de (les) choisir… ». De plus, le « principe d’ouverture et d’équilibre » assure que lorsque les États adoptent des mesures pour favoriser la diversité des expressions culturelles, « ils devraient veiller à promouvoir, de façon appropriée, l’ouverture aux autres cultures du monde ». Les droits et obligations des Parties (articles 5 à 11) comprennent une série de politiques et mesures visant à protéger et à promouvoir la diversité des expressions culturelles, à savoir aborder la créativité avec toutes les implications qu’elle connaît dans le contexte de la mondialisation où les diverses expressions sont mises en circulation et rendues accessibles à tous par l’entremise des biens et services culturels. A ce titre, les Parties, reconnaissant le rôle fondamental de la société civile, s’efforceront de créer un environnement encourageant les individus et les groupes sociaux « à créer, produire, diffuser et distribuer leurs propres expressions culturelles et à y avoir accès, en tenant dûment compte des conditions et besoins particuliers des femmes, ainsi que de divers groupes sociaux, y compris les personnes appartenant aux minorités et les peuples autochtones » et « de reconnaître l’importante contribution des artistes et de tous ceux qui sont impliqués dans le processus créateur, des 27 communautés culturelles et des organisations qui les soutiennent dans leur travail, ainsi que leur rôle central qui est de nourrir la diversité des expressions culturelles ». Il est à souligner que la promotion de la coopération internationale, concernant plus particulièrement les pays en développement, est au cœur de la Convention (articles 12 à 19). A cet effet, la création d’un Fonds international pour la diversité culturelle est prévue (article 18) dont les ressources sont constituées par les contributions volontaires des Parties, les fonds alloués par la Conférence générale de l’UNESCO, les divers versements, dons ou legs, tout intérêt dû sur les ressources du Fonds, le produit des collectes et recettes des manifestations organisées au profit du Fonds, et toutes autres ressources autorisées par le règlement du Fonds. Le souci d’assurer une cohérence entre la Convention et les autres instruments internationaux existants a guidé les États vers l’inclusion d’une disposition (article 20) visant à assurer une relation de « soutien mutuel, complémentarité et non-subordination » entre ces instruments. En même temps, « rien dans la présente Convention ne peut être interprété comme modifiant les droits et obligations des Parties au titre d’autres traités auxquels elles sont Parties ». La Convention établit une série de mécanismes de suivi visant à assurer une mise en œuvre efficace du nouvel instrument. Parmi ceux-ci, un mécanisme non contraignant de règlement des différends permet d’aborder, dans une perspective strictement culturelle, d’éventuelles divergences de vues sur l’interprétation ou l’application de certaines règles ou principes relatifs à la Convention (article 25). Ce mécanisme encourage d’abord la négociation, puis le recours à la médiation et aux bons offices. En dernier recours, une procédure de conciliation peut être engagée. La Convention ne prévoit aucun mécanisme de sanctions. Enfin, il faut rappeler que l’Acte constitutif de l’UNESCO lui donne mandat, à la fois de respecter la « féconde diversité des cultures » et de « faciliter la libre circulation des idées par le mot et par l’image », principes réaffirmés dans le Préambule de la Convention. L’Organisation, qui fêtera en novembre prochain son 60e anniversaire, n’a pas ménagé ses efforts pour remplir cette double mission. Avec cette Convention, elle complètera utilement son action normative visant à défendre la diversité culturelle dans toutes ses manifestations, et plus particulièrement les deux piliers de la culture : patrimoine*** et création contemporaine. *** Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation, l'exportation et le transfert de propriétés illicites des biens culturels (1970) - Convention sur la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (1972) – Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (2003) Source Communiqué de presse N°2005-128 Auteur(s) UNESCOPRESSE 30 Pour Malraux, l’expression « Musée Imaginaire » à laquelle il est resté attaché ne signifiait pas le musée des préférences esthétiques de chacun, mais l'ensemble des oeuvres qui s'imposent à la sensibilité d'une époque et à pratiquement tout le monde, puisque ces œuvres sont accessibles grâce au moyens modernes de communication et de duplication. Ces oeuvres, notre siècle les a découvertes, ou il a appris à les regarder autrement. Leclerc : LE MUSEE IMAGINAIRE Pour Malraux, la modernité est la confrontation, a partir d'une civilisation devenue agnostique (la civilisation occidentale ), de toutes les formes artistiques ayant existe, de toutes les créations esthétiques ayant, au sein des civilisations historiques, prétendu au statut d'absolu. Toutes les civilisations ont produit « un art », des formes de ce que nous appelons l'art; mais aucune n'avait, avant la nôtre, conçu « l'art » en lui-même, ne l'avait envisagé en tant que forme de création humaine autonome, séparable des autres formes de production culturelle : « Les idoles deviennent des œuvres d'art en changeant de références, en entrant dans le monde de l'art que nulle civilisation ne connut avant la nôtre » (1957, p. 20). C'est pourquoi Malraux a pu affirmer, dans La métamorphose des dieux, que le « monde de l'art » est né avec la civilisation moderne universelle. II est né des conquêtes, des explorations, des fouilles archéologiques accomplies par les conquistadors de l' Amérique, les explorateurs de l' Afrique, les chercheurs orientalistes... Pour la première fois existe une tradition mondiale, universelle. Notre culture réunit, rassemble dans une présence commune les statues égyptiennes et sumériennes, les sculptures de Chartres et celles de Michel- Ange, les fresques de Piero de1la Francesca et les toiles de Rembrandt, les fresques de Lascaux et les peintures de Van Gog, les fresques d' Ajanta et celles de Saint-Savin, Versailles et la Cite interdite, le Taj Mahal et la Grande Mosquée de Cordoue... « Aucune civilisation, avant la nôtre, n'a connu le monde de l'art créé par les artistes pour qui l'idée d'art n'existait pas » (1957, p. 3). Notre civilisation présente la particularité unique de reconnaître comme art non seulement ses propres créations esthétiques, mais l'ensemble des productions créées par tous les hommes d'autrefois et d'ailleurs : « L'art d'une civilisation est à la fois celui qu'elle crée, et l'ensemble des figures présentes pour elle. La Renaissance n'a pas apporté seulement un nouvel art des vivants, mais encore un nouvel art des morts ; notre ère n'apporte pas seulement sa peinture, mais encore celle de son Musée imaginaire » (1957, p. 20). Dans toutes les civilisations du passé, l'art a été lié à la religion: l'art était un art religieux, un art sacré. Dans notre civilisation, l'art est devenu agnostique en s'autonomisant par rapport à la religion. La civilisation moderne séculière, en constituant l'art comme un monde en soi, est amenée à reconnaître en même temps la dimension sacrée qu'a possédé l'art antérieurement à la modernité occidentale : « La première civilisation agnostique, ressuscitant toutes les autres, ressuscite les œuvres sacrées » (1957, p. 1). La civilisation occidentale, en inventant l'approche comparative, en rassemblant sous un œil à la fois esthétique, historique et scientifique, l'ensemble des productions humaines (celles du moins qui n'ont pas été détruites au fil des temps), invente la modernité transculturelle. La civilisation occidentale est une réalité « transcivilisationnelle » : « Le Musée imaginaire, qui n 'a d'autre lieu que l'esprit de chacun, ne veut pas être l'héritage d'une nation, comme les offices ou le Prado, ni même d'une civilisation, comme le Louvre, la National Gallery de Londres ou celle de Washington. En lui les grands arts européens deviennent de grands arts parmi d'autres, comme l'histoire de l'Europe est devenue pour nous une histoire parmi d'autres » (1957, p. 22). La civilisation occidentale ne construit plus de cathédrales, elle ne produit plus d'art sacré. Elle a cessé de faire jouer à l'art une fonction religieuse, depuis qu'elle a perdu une partie de sa croyance dans les dieux. Elle construit par contre des musées, et voit dans l'art une forme nouvelle de l'absolu, comme elle voit dans l'éternité des oeuvres d'art un succédané possible de la mort des dieux. Est-ce parce qu'en confrontant l'ensemble des oeuvres d'art, elle ne peut plus croire aux dieux que chacune d'entre elles était censée apprivoiser ? Est-ce parce que, ne croyant plus aux dieux, elle peut regarder d'un regard purement « esthétique » ou « esthétisant » des « objets » qui autrefois 31 furent porteurs de valeurs religieuses, donc non purement « esthétiques » ? « Le musée transforme l'oeuvre en objet » (1957, p. 21). P. 302-303 2. La « bibliothèque de Babel » selon Gérard Leclerc Leclerc va donc élargir le « musée imaginaire » -artistique- de Malraux au domaine de la littérature, une littérature qui est désormais mondiale, qui s’inscrit dans le concept de « mondialité » - non plus de la « mondialisation » - de la culture. Que suppose, pour Leclerc, la mondialité culturelle ? Cela suppose des contacts humains et des « instruments intellectuels de compréhension entre les groupes ainsi mis en contact de façon plus ou moins brutale ». Pour ce qui est de la littérature (culture textuelle), puisqu’il y a un décloisonnement des cultures, des contacts généralisés et des moyens de reproduction illimités, il convient de faire « ce que Malraux avait fait pour le domaine de l’art (…). La bibliothèque de l’homme du XXIe siècle sera – pourra être – non plus nécessairement cellle d’une civilisation, mais la Bibliothèque de Babel, où se mêlent toutes les langues, toutes les croyances, tous les livres, tous les textes… ». En soi, cette « bibliothèque de Babel, si elle était imaginée comme un outil rassembleur, unificateur, pourrait être la meilleure et la pire des choses :  Dans le meilleur des cas, cette mondialité culturelle révélerait points communs et différences. On passerait avec bonheur de la séparation des cultures à des situations de contacts généralisés, une acculturation à l’échelle mondiale, une « interculturalité » à l’échelle globale.  Dans le pire des cas, au lieu d’aider les hommes à surmonter leurs antagonismes, cela pourrait les conduire de conflits culturels en confrontations dramatiques. Leclerc, donc, ne confond pas contacts culturels et unité culturelle. Il fait preuve d’un optimisme prudent : « Le pire est possible, mais pas sûr ». Ainsi, la mondialisation de la culture est peut-être un processus pouvant conduire à une situation catastrophique : l’ethnocide généralisé, c’est-à-dire la mort des cultures et des diversités culturelles. Cela peut tout aussi bien être un processus conduisant à une situation positive, une diversité dans l’unité. Mais la prudence s’impose : la situation positive, si elle est atteinte (?) devra faire l’objet de soins très attentifs, puisqu’on sait quel fut le sort de la tour de Babel… LES ENJEUX DE LA MÉDIATION CULTURELLE, CE N’EST PAS DE « FAIRE LA FÊTE »! 32 Les enjeux du XXIè siècle et des siècles à venir sont énormes. Les politiques culturelles nationales et internationales, on le voit maintenant (on l’a vu avec la diversité culturelle et le travail de l’Unesco) seront déterminantes, non seulement pour la seule préservation de la (des) culture(s) de chaque pays, mais aussi pour l’Homme et la Paix. 3. La politique culturelle française selon Jean-Michel Djian, ou « comment penser le culturel au futur » Djian publie en 2005 Politique culturelle : la fin d’un mythe. Paris, Gallimard, 2005. Dans son quatrième et dernier chapitre intitulé « Une géopolitique culturelle internationale en devenir », il essaie de démontrer que les discours officiels de la France en termes de politique culturelle extérieure ne résistent pas à la réalité. Cependant, fille des Lumières, la France est écoutée. Mais, pense Djian, l’impact du discours français en la matière « reste à démontrer » Le pluralisme culturel au futur Comment fonder un principe commun de reconnaissance entre droits culturels inhérents à chaque culture, quand on sait que chacune est à elle-même sa propre juridiction, sa propre norme, et qu'elle ne se départira pas si aisément de ses critères du licite et de I'illicite, du bien et du mal, du juste et de I'injuste, de I'obéissance et de la transgression, de I'innocence et de la force ? II y a un hermétisme propre, interne à chaque conviction culturelle, qui rend inextricable le désaccord ontologique entre elles. Avec la notion de droit culturel, c'est-à-dire de légitimité propre à chaque culture, il y a déjà la reconnaissance implicite d'une morale valable pour tous les hommes. Aucun acte ne pourrait plus être répréhensible aux yeux de la conscience universelle, non pas parce qu'il ne serait pas condamnable en soi, mais parce qu'il n'y aurait plus de conscience universelle pour I'affirmer. Pour surmonter cette irrésolution, il faudrait imaginer une instance supérieure dont le génie comparatif aurait su extraire un nouveau syncrétisme supraculturel, prescriptible pour toutes les cultures. Mais qui pourra occuper cette position de souveraineté incontestable ? Quelle raison supérieure viendra au bout de toutes les passions culturelles si tant est que le mot raison ait une signification de jugements similaires dans toutes les cultures ? Nous touchons là, avec le pluralisme, la question du malentendu intellectuel et affectif entre les cultures. » Hélé Beji, in Jérôme Binde (dir.), Entretiens du xxe siècle, Unesco/Albin Michel, 2004.
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