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Notes sur le bas de pages - 2° partie, Notes de Gestion des affaires

Notes de gestion sur le bas de pages - 2° partie. Les principaux thèmes abordés sont les suivants: le traité d’Économie politique, Suppositions, l'effet de l'impot, remarques.

Typologie: Notes

2013/2014

Téléchargé le 10/01/2014

Sylvestre_Or
Sylvestre_Or 🇫🇷

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Télécharge Notes sur le bas de pages - 2° partie et plus Notes au format PDF de Gestion des affaires sur Docsity uniquement! d'accumuler sur sa tête toutes les haines de la bureaucratie, par l'impitoyable rigueur avec laquelle il disséqua les budgets d'alors, et si les plaidoyers les plus énergiques contre les maltôtiers modernes sont partis des rangs des économistes. C'est qu'en effet ils sont les défenseurs nés des classes laborieuses et qu'ils ont, plus encore que les réformateurs politiques, ôté la couronne aux hommes de la féodalité pour la donner aux hommes de la paix et de la production : c'est que Ad. Smith, Turgot, Sismondi, en quelques lignes, ont donné la force d'axiomes à ces notions d'égalité qui n'existaient dans les âmes qu'à l'état de sentiment. Pour eux, en effet, la classe taillable et corvéable est, avant tout, surtout, la classe oisive, rentée, aristocratique, et ils se sont parfaitement entendus dans l'émission de cette vérité bien simple : — le seigneur, le financier, le bourgeois, gentilhomme ou non, participant plus largement que l'ouvrier aux joies et aux splendeurs de la civilisation, doivent participer plus largement aussi à ses dépenses. Il en est de cette répartition des charges publiques comme des taxes que les directeurs de concerts prélèvent sur la curiosité et le dilettantisme. Le même spectacle est ouvert à tous : le même lustre verse sur la scène ses gerbes de lumière -, les mêmes vers, les mêmes harmonies font courir sur tous les fronts le souffle divin du génie ; les mêmes décors, le même fard, les mêmes pirouettes, suivies des mêmes coups de poignard, s'adressent à tous les spectateurs, et cependant lisez le tarif, que de nuances de prix correspondant à combien de places différentes! Les charges qui pèsent sur chacun sont mathématiquement proportionnées à la dose d'aisance, de commodité dont il jouit, et si nous avions à proposer aux législateurs un modèle pour la péréquation de l'impôt, nous n'en voudrions pas d'autre que cette échelle si habilement graduée par les imprésarios. La civilisation n'est-elle pas, en effet, une fête immense et perpétuelle que le genre humain se donne à lui-même, et ceux-là qui assistent à cette fête du haut de leurs amphithéâtres somptueusement décorés, n'en doivent-ils pas défrayer les dépenses plus largement que la foule qui gronde dans l'arène poudreuse du parterre, ou qui s'agite, comme l'Irlandais de nos jours et l'Ilote de l'antiquité, sans même entrevoir les splendeurs de ce jubilé? C'est ainsi que l'on est amené forcément à placer au-dessus du principe qui veut qu'on frappe chaque citoyen dans la mesure de ses ressources, un autre principe plus grand encore, qui porte en lui la solution à la fois mathématique et paternelle du vaste problème de l'impôt et qui n'est que la loi de la solidarité sociale mise en chiffres. Ce principe entrevu par Montesquieu, confirmé par J.-B. Say, et formulé dans la théorie de l'impôt proportionnel, veut ceci : La taxe qui atteint cette portion de la richesse du pays qui sert à la satisfaction des premiers besoins, doit être infiniment moins lourde que celle supportée par les consommations de luxe. Ainsi, des esprits que l'on a traités de rêveurs et de révolutionnaires, — et nous nous faisons honneur d'appartenir à cette jacquerie financière, — certains esprits ont eu l'audace de penser et de dire que tout homme doit avoir dans ses ressources une partie inviolable, respectée, celle où il puise son existence matérielle et celle de ses enfants. Ce fonds indispensable, qu'on ne saurait atteindre sans commettre un crime pareil à celui qu'on commettrait en diminuant la somme d'air qu'il faut à ses poumons, la somme de liberté qu'il faut à sa conscience, ce fonds ne relève pas de l'impôt c'est le tribut payé à la faim, à la nature. Le prélèvement de la société commence là où la consommation des individus franchit les lignes sévères du besoin pour entrer dans le domaine infini et varié des choses d'agrément>u de luxe- C'est alors que l'impôt doit frapper, et frapper avec une énergie d'autant plus grande, que la consommation est plus facultative, plus futile : de telle sorte qu'au bas de l'échelle l'homme du peuple ne soit pas obligé de partager avec le fisc le morceau de pain que trempent ses sueurs, et qu'au sommet, au contraire, les grands seigneurs, les primadona et les vieilles marquises paient fort cher le droit d'avoir des chevaux pur sang, des rivières de perles et des king-charles. Eu un mot nous ne verrions, avec tant d'autres, aucun inconvénient à ce que la taxe fût de 100 pour 100 pour les mille superfluités qui égaient la vie des privilégiés d'ici-bas, s'il fallait acheter à ce prix le dégrèvement du sel, du vin, des lettres • et nous trouverions fort raisonnable une loi qui, établissant une taxe de 2 pour 100 sur un revenu de 500 francs, grèverait de 3 pour 100 un revenu de 1000 francs, de 6 pour 100 un revenu de 10,000 fr., et ainsi de suite. Si même l'on objectait, ce que l'on a constamment objecté, que nous mentons au grand principe de la proportionnalité des charges, que nous oublions les notions les plus simples de l'arithmétique, nous dirions que la science sociale, opérant sur des éléments sensibles et non sur des abstractions, nedoitpas chercher l'équilibre des charges publiques dans des formules mathématiques, fausses à force de vérité, mais bien dans une appréciation intelligente des droits, des besoins, des instincts de chacun. Vouloir que l'ouvrier qui a lentement accumulé à force de sueurs, de privations un revenu de 500 fr., paie au trésor 50 fr., par la raison que le grand propriétaire jouissant d'un revenu de 50,000 fr., paierait 5000 f., c'est vouloir que parce qu'un homme de vingt ans peut soulever un poids de 200 kilogrammes, un enfant de deux ans soulève un poids de 20 kilogrammes qui briserait ses faibles bras; c'est vouloir l'absurde, l'injuste ; c'est ne tenir compte ni du développement des forces individuelles ni des nécessités sociales. Quoi qu'on dise ou fasse, en effet, il sera toujours plus facile pour le riche de renoncer à des voluptés gastronomiques, que pour le pauvre de renoncer à un pain noir qu'il brise parfois à coups de hache, comme dans les Alpes, comme en Suède, lorsque la faim le presse et que sa dent ne peut l'entamer. On a dit, il est vrai,— et sans remuer ici la question si vaste et si compliquée des impôts, il nous est permis d'en dresser l'état actuel et les contours généraux, — on a dit que l'impôt ainsi conçu, tendait, sous des apparences spécieuses, à décourager l'accumulation des capitaux par une sorte de maximum dirigé contre ceux qui grossissent leur fortune et leurs revenus : on a ajouté que, fatal sous ce rapport, notre système était de plus inefficace en ce que les consommations de luxe étant purement facultatives, les classes opulentes les délaisseraient pour éviter l'impôt. À la première accusation je réponds par cette simple réflexion, que s'il est bon de ne pas décourager l'accumulation,— ce qu'un impôt bien établi serait d'ailleurs bien loin de faire, — il est urgent et charitable de ne pas décourager le travailleur en rognant son modique salaire au moyen des octrois, des taxes sur les matières premières, etc. Qui n'aimerait mieux voir s'arrêter dans leur progression géante les fortunes de nos modernes traitants ? qui n'aimerait mieux provoquer le découragement chez des millionnaires avides de nouveaux trésors, plutôt que devoir le malheureux canut en lutte avec le fisc? Quant à l'inefficacité des impôts somptuaires, nous pourrions la réfuter d'un seul mot, en citant l'exemple de l'Angleterre et de quelques autres pays où le trésor prélève des tributs considérables sur la vanité et la frivolité des classes aisées : nous pourrions dire que quelques francs de plus ajoutés par l'impôt à des objets de luxe comme ceux dont nous avons déjà parlé, pèsent bien peu devant la par le souffle du progrès, les barrières de l'octroi tomberaient avec celles de la douane aux applaudissements de tous. Je ne veux pour [garants de ces applaudissements, que les passages lumineux que M. Horace Say a consacrés à ce problème des octrois dans ses belles Études sur l'administration de la ville de Paris*. Renoncer aux magnifiques recettes que font les caisses municipales avec leurs droits d'entrée, est quelque chose qui peut paraître aussi utopique qu'héroïque : mais il faudra bien y venir le jour où les idées que nous venons d'émettre, et que couvre la sanction de maîtres illustres, auront fait irruption dans l'esprit public ; d'ici là il faudra ramener peu à peu les droits sur les denrées de première nécessité à des tarifs qui semblent légers, même aux plus pauvres : d'ici là il faudra faire violence au trésor, par le raisonnement, pour lui faire adopter ces tarifs modérés, qui seraient son honneur et sa richesse s'il savait s'en servir. Et comme les améliorations s'enchaînent, comme le bien a sa logique ainsi que le mal, la nécessité d'alléger le fardeau qui retombe sur les classes pauvres, conduira à la nécessité de diminuer l'ensemble des charges publiques ; de désarmer ces légions de soldats qui sont un véritable anachronisme à une époque où triomphent les théories de la paix ; d'arracher de nos dépenses toutes les branches gourmandes, de nos industries tous les monopoles, de notre régime économique tous les; abus. Le licenciement de la moitié de l'armée, suivant le mode prussien, n'ôterait rien de leur héroïsme à nos soldats, restituerait à la production des bras vigoureux, et permettrait de faire à la nation la remise de deux à trois cents millions. Or, ce licenciement que tout rend probable, s'effectuera dès l'instant où corn prenant l'amère tristesse de Napoléon à Eylau, on se détournera avec horreur des champs de bataille. La philosophie nous apprend en effet que toutes les fois qu'on creuse la tombe d'un homme on creuse celle d'une richesse matérielle et intellectuelle : la nation perd un citoyen, la famille un ami, l'Économie politique une valeur — et la plus noble de toutes. Si maintenant nous voulions résumer en quelques ligues, nos idées sur la répartition de l'impôt, sur le point où il doit cesser et commencer, nous proposerions, en complétant et élargissant les maximes posées par Sismondi, Smith et Ricardo, les règles suivantes : 5. L'impôt, pour être régulièrement et solidement assis , doit atteindre surtout les revenus fixes, les propriétés, les différentes branches du travail industriel et commercial, par les contributions directes, les patentes et une application judicieuse de l'income-tax (taxe sur les revenus). 6. L'impôt, pour être équitable, doit ne s'adresser aux revenus incertains, variables de l'employé, de l'artiste, de l'ouvrier, qu'après avoir épuisé toutes les autres sources de recettes. 7. L'impôt, pour être réellement proportionnel, doit effleurer seulement les objets de consommation nécessaire pour peser lourdement sur les matières de luxé et d'ostentation. De même. De taxe sur les revenus devra tenir compte non seulement du chiffre des revenus, mais encore de leur destination, et ne pas demander 5 pour cent à un pauvre rentier de 500 fr., comme au Nabab qui reçoit annuellement 500,000 francs. 8. L'impôt, pour être productif, doit être modéré, et l'être d'autant plus, qu'il atteindra des objets de consommation générale, qui s'adressent surtout aux humbles, aux pauvres. De cette manière on attend, pour y puiser, que les richesses du pays soient créées et on n'en tarit pas les sources en accablant le travailleur : de cette manière on est juste tout en étant charitable, charitable tout en étant habile, noble et triple résultat que nous recommandons à nos législateurs. A.F. 56. M. Ricardo part toujours du principe qu’on est loin de lui accorder, que l’impôt sur les premiers produits, et que l’impôt en nature, comme la dîme, ne tombent pas sur le propriétaire foncier, mais bien sur le consommateur. C’est qu’il admet pour la fixation des prix d’autres bases que la quantité offerte et la quantité demandée de chaque chose en chaque lieu, quoiqu’il n’y en ait point d’autre. C’est sur ce fondement que Smith a justement établi que l’impôt sur les terres, aussi longtemps qu’il n’altère pas la qualité et la quantité des produits livrés à la consommation, n’en fait pas hausser le prix, et par conséquent n’est pas payé par le consommateur. — J.-B. Say. 57. Si, dans mon Traité d’Économie politique, j’ai dit que l’impôt en nature, avec l’apparence d’être le plus équitable des impôts, en était le plus inégal, c’est après avoir prouvé, d’après Smith, dont je crois le raisonnement bon, que tous les impôts sur les terres, ou sur le produit immédiat des terres, tombent sur les propriétaires fonciers.Or, dans l’exemple cité, le produit net des deux terres, qui est pour l’une de 10,000 fr., et pour l’autre de 4,000 fr., n’est pointée qui compose le profit du fermier, c’est ce qui compose le profit du propriétaire, le fermage : non pas ce que le fermier gagne, mais au contraire ce qu’il paie. J’ai donc été fondé à dire qu’un impôt qui enlève à l’un le quart de ce fermage, de ce produit net, et à l’autre seulement le dixième, est un impôt fort inégal. Si l’impôt en nature tombait sur les profits du fermier ou du cultivateur, non pas en tant que propriétaire , mais en tant que capitaliste industrieux (ce que je ne crois pas ), il serait inégal encore ; car, dans l’exemple cité, un fermier qui ferait annuellement des avances de culture égales à 2,000 fr., paierait 1,000 fr. d’impôts ; et celui qui ferait des avances égales à 8,000 fr., c’est-à-dire qui emploierait une industrie quatre fois plus grande, et ferait en conséquence des profits probablement quatre fois plus considérables, ne paierait aussi que 1,000 fr. d’impôts. — J.-B. Say. 58. L’auteur met ici en opposition deux impôts supposés ; mais je crains qu’il ne se trompe sur l’effet qu’il leur attribue. Si le gouvernement levait cent quarters de blé sur mille, et continuait à les lever, les neuf cents quarters qui resteraient ne vaudraient jamais plus que neuf cents ; car les cent quarters levés par le gouvernement retourneraient toujours à la consommation, quoique dans l’intérêt du prince. Il y aurait toujours la même quantité produite et le même nombre de consommateurs. Quant à l’impôt sur l’or, je pense, au contraire, que le gouvernement, en raison du monopole de la fabrication des monnaies, pourrait mettre dans la circulation neuf cents onces d’or en monnaie, et les faire valoir autant que mille en lingots. — J.-B. Say. 59. Nous croyons avoir réfuté cette décourageante doctrine dans un précédent chapitre. A. F. 60. Il serait très-avantageux pour les propriétaires que l’impôt atteignît les profits du fermier, plutôt que ceux de tout autre capitaliste. En effet, on asseoirait alors sur les consommateurs de denrées agricoles, une taxe qui profiterait et à l’État et aux maîtres du sol. 61. De plus longues réflexions me font douter de la nécessité où l’on se trouverait d’avoir plus d’argent pour desservir la circulation de la même somme de marchandises, dans le cas où les prix hausseraient par l’impôt et non par les difficultés de la production. Supposons qu’à une certaine époque, en un certain lieu, 100,000 quarters de blé se vendent à raison de 4.V. par quartier, et que, par suite d’une, contribution directe de 8 sch, le prix s’élève à 4 l. 8 sh., je crois que la même masse de numéraire suffirait dans les deux cas. Ainsi, si j’achetais auparavant 11 quarters à 4 l., et que le poids de la taxe me forçât de réduire ma consommation à 10 quarters, il me faudrait la même somme de numéraire, uniquement, car dans tous les cas je paierais 44 l. pour mon blé. La nation consommerait en réalité un onzième de moins, et ce onzième irait augmenter la consommation du gouvernement. L’argent serait prélevé par l’État sur le fermier, mais celui-ci retrouverait les 8 sch. dans la vente de son blé. Aussi cette taxe est-elle réellement une taxe en nature, et n’exige-t-elle aucun excédant de numéraire ; —du moins, cet excédant est-il si faible qu’on peut le négliger sans crainte. 62. M. Ricardo, dans tout ce chapitre, et dans plusieurs autres endroits de son ouvrage, ne fait pas attention qu’il y a une autre variation de prix qu’une variation purement relative. Pour lui l’argent devient plus cher si dans un achat on donne moins d’argent pour avoir une même marchandise- A ce compte, comme on donne à présent seulement une once d’argent environ pour acheter un volume ordinaire, un Nouveau-Testament, par exemple; tandis que pour se procurer le même ouvrage en l’année 1500, il fallait donner environ deux onces d’argent, il en résulterait que l’argent est devenu plus cher, plus précieux, puisqu’on en donne moins pour une quantité de marchandise pareille. Cependant il n’en est rien. D’autres considérations nous ont appris, au contraire, que l’argent est dix fois plus abondant, et environ quatre fois meilleur marché qu’en 1500. Si l’on donne une fois autant de livres pour un même poids d’argent, il faut donc que les livres aient diminué de prix dans la proportion à peu près de huit à un. Il m’est impossible de me livrer ici aux développements qui seraient nécessaires pour faire entendre la différence qu’il y a entre une baisse réelle et une baisse relative des prix ; on les trouve dans mon Traité d’économie politique, liv. II, chap. 4. Ils se réduisent en somme à ceci : la baisse du prix d’un produit est réelle lorsque, avec les mêmes moyens de production, les mêmes frais de production, le même terrain, le même capital, le même travail, on obtient une plus plus grande quantité de produit. Un livre imprimé, comparé avec un livre manuscrit, coûte huit fois moins d’intérêt de capital et de main-d’œuvre : donc il est réellement huit fois moins cher. Une once d’argent coûte, en Europe, quatre fois moins d’avances et de main d’oeuvre qu’elle ne coûtait en 1500 ; elle est réellement quatre fois moins chère. La valeur relative de ces deux choses a changé, mais la valeur de l’une n’a pas haussé. Avec la même fortune, avec le même revenu, c’est-à-dire le même fonds de terre, le même capital, le même travail industriel qu’en 1500, un homme peut avoir huit fois plus de livres et quatre fois plus d’argenterie. — J.-B. Say. 63. Dans la note de la page 129, nous avons fait voir ce qu’il y a de vrai et ce qu’on peut aussi découvrir d’erroné dans cette proposition du savant et profond commentateur de Smith. A. F. 64. Rien de plus vrai que le contraste offert par le renchérissement des subsistances, et la dégradation des salaires, aux époques de disette. C’est qu’en effet la lutte se trouve alors engagée entre deux faits bien distincts : un fait naturel, physique, qui est la végétation; un fait social, qui est l’offre et la demande des bras : — le premier frappant comme la foudre, le second ne pouvant subir que des transformations lentes, du moins quand ces transformations ne sont pas précipitées, aggravées par les crises de l’industrie, du commerce ou de l’agriculture. Un mois suffit, en effet, pour dessécher la racine des plantes, et frapper de mort les ressources agricoles de tout un pays ; mais il faut des années quand il ne faut pas des siècles pour accroître avec l’industrie la valeur du travail. Un mois suffit pour tripler le prix du Cette législation est nécessitée par la circonstance qu’il y a en Angleterre, dans la réalité, deux pris naturels pour le blé. L’un se compose des frais de production du blé produit par les fonds de terre du pays ; l’autre, des frais de production du blé produit par l’industrie commerciale, du blé que l’Angleterre doit à son commerce. Ce dernier prix est en général plus bas que l’autre ; et si le gouvernement n’ordonnait pas qu’il ne sera versé du blé du commerce qu’autant que le prix s’en élèvera à 80 sch., les cultivateurs ne pourraient soutenir la concurrence des négociants ; ils ne vendraient pas un quarter de grain ce que ce quarter leur coûte : ils abandonneraient cette culture, au moins en partie, et acquitteraient difficilement leurs contributions, leurs fermages et la taxe des pauvres. C’est ainsi que l’autorité publique entretient perpétuellement une espèce de disette factice, un prix monopole, qui, par suite du même système, s’étend à beaucoup d’autres marchandises, rend la vie difficile, et chasse hors de leur terre natale un si grand nombre d’Anglais. Pour être conséquent dans ce système vicieux, en même temps qu’on diminue, ou, ce qui revient au même, qu’on empêche de s’accroître les objets de consommation, il faudrait empêcher de s’accroître le nombre des consommateurs ; mais on n’est point d’accord là-dessus en Angleterre : j’en juge par les contradictions qu’éprouve M. Malthus. L’un n’est pourtant que la conséquence nécessaire de l’autre. On ne peut soutenir que par de mauvais palliatifs une santé politique altérée par des excès qu’on ne veut pas corriger. — J.-B. Say. 66. Il est impossible d’accorder à l’auteur que la demande du travail reste la même lorsque le travail augmente de prix. Si donc, l’ouvrier quand on le force à payer un nouvel impôt, voulait s’en faire rembourser par ceux qui l’emploient, à coup sûr la demande faite par ceux-ci diminuerait. Il n’y a pas de fait plus constant et mieux expliqué dans toute l’économie politique. — J.-B. Say. 67. L’effet de l’impôt est nécessairement très-compliqué, parce que les différentes classes sur lesquelles il porte ou qui en font l’avance sont placées dans une foulé de situations variées, plus ou moins avantageuses ou désavantageuses pour en rejeter le fardeau sur d’autres classes. Vouloir décider de l’effet de l’impôt par des principes trop absolus, et sans tenir compte de la multitude de circonstances qui modifient son effet, c’est vouloir, selon moi, arriver à des résultats fort différents de ceux que nous présente l’observation. Que l’on mette un impôt sur la fabrication ou les fabricateurs de chapeaux ; que ce soit une patente ou bien une estampille, ou bien un droit sur la matière première, ou le local, ou les ouvriers chapeliers, peu importe ; que ce droit s’élève à 2 fr., je suppose, pour chaque chapeau de 20 fr., qu’arrivera-t-il ? les chapeaux se paieront-ils 22 fr. ? Non ; il faudrait pour cela que la demande restât la même, ce qui n’est pas possible. Les chapeaux se paieront-ils 20 fr. comme auparavant ? probablement non ; il faudrait que les producteurs payassent en totalité l’impôt sur leurs gains ; or cette circonstance, rendant cette production moins avantageuse, diminuerait la quantité offerte deé moyens de production des chapeaux. Pour qu’elle se balance avec la nouvelle quantité qui sera demandée, il faudra peut-être payer non pas 18 fr., mais 19 fr. la totalité des services productifs propres à faire un chapeau ; et l’impôt de 2fr. payé, il se trouvera que le consommateur aura payé 21 fr. un chapeau de la qualité de ceux qu’il payait 20 fr., et que les producteurs auront vendu 19 fr. cette même qualité dont ils obtenaient 20 fr. avant l’impôt que nous avons supposé s’élever à 2 fr. L’impôt aura porté en partie sur les producteurs, entrepreneurs et ouvriers, mais dans des proportions fort diverses ; en raison de la diminution de leurs gains, et en partie sur les consommateurs, à cause de l’augmentation du prix, et la production de cet article, omme sa consommation, auront diminué. Avec quelques variations dépendantes de circonstances diverses, c’est à peu près là l’effet de toute espèce d’impôt ; et cet effet, résultat de la nature des choses et du raisonnement qui l’explique suffisamment, ébranle, je le dis avec chagrin, l’édifice que M. Ricardo, non-seulement dans ce chapitre, mais dans quelques autres, élève avec beaucoup d’habileté sur des principes trop absolus. M. Ricardo djra peut-être à l’appui de sa doctrine qu’il faut bien que la quantité de travail industriel se proportionne au capital productif de la société; qu’ainsi il ne peut pas y avoir moins de chapeaux produits après l’impôt qu’auparavant ; que la quantité offerte restant la même, le prix n’en peut pas monter, et que s’il y a 2 fr. d’impôt à payer, il faut que ce soit l’entrepreneur seul qui en supporte la perte. Je répondrai, en premier lieu, qu’un commerce grevé d’impôts exige, en proportion des quantités produites, plus de capitaux ; en second lieu, qu’une partie des capitaux sorte évidemment d’un emploi qui devient moins avantageux, sans que ce soit toujours pour se porter sur d’autres productions également favorables au bien-être de la.société, et qu’ils en sortent aussi pour être voués à la consommation improductive, à la destruction. Ne voyons- nous pas chaque année, au moyen des emprunts publics, la plupart des gouvernements de l’Europe détruire une partie considérable des épargnes et des capitaux de leurs sujets ? Ils rendent d’une part la production désavantageuse par des impôts exagérés, et d’autre part offrent complaisamment aux producteurs de dévorer à la suite d’un emprunt les capitaux qui, par leur faute, rendent trop peu entre les mains de l’industrie. Le vice nourrit le vice ; et s’il n’y avait pas maintenant en Europe, dans le monde entier, un développement de connaissance et d’activité industrielle supérieur à tous les exemples que nous fournissent les temps historiques, un développement qui fait plus que balancer les maux qui résultent de la mal-administration, il ne tiendrait pas à la politique européenne que la civilisation du monde rétrogradât on ne sait où. — J.-B. Say. 68. N’y a-t-il point dans tout ce qui précède une confusion entre le fonds destiné à la consommation improductive, à la simple satisfaction des besoins de l’homme, et le fonds destiné à la reproduction, qu’on nomme le capital ? Lorsqu’on fait payer à un ouvrier un impôt qu’il ne peut se faire rembourser ni par son maître, ni par le consommateur du produit auquel il concourt lorsque le montant de cet impôt est donné à un courtisan, il est clair que le fonds de consommation du courtisan ou du percepteur est augmenté de tout ce qui est ôté au fonds de consommation de l’ouvrier; les jouissances du premier sont multipliées aux dépens quelquefois des besoins urgents du second ; mais on peut dire, à là rigueur, que la demande des travaux productifs n’est pas diminuée : elle n’est que déplacée On demande, en travaux qui concourent à des objets de luxé, ce que l’ouvrier cesse de demander en bonne nourriture, en bons vêtements, en ameublements commodes. Lorsque l’impôt est pris sur le capital, il ne faut pas croire qu’il achète autant de travaux que s’il était demeuré dans cet utile emploi. A la vérité, le gouvernement se sert de son montant pour faire des achats qui remplacent ceux qu’aurait faits cette portion de capital ; c’est-à-dire peut- être de la poudre à canon, au lieu de la laine dont on aurait fabriqué dû drap; mais la poudre à canon ne se reproduit pas par elle-même, tandis que le drap, une fois fabriqué, se vend, et de sa valeur on recommence à acheter de nouvelles denrées dont la production fait travailler de nouveau les producteurs, et le même jeu se renouvelle perpétuellement. Dans ce cas, il ne faut pas dire que le-montant de l’impôt entre les mains du gouvernement réclame autant de travaux industriels qu’entre les mains des particuliers. — J.-B. Say. 69. M. Say paraît être imbu de l'opinion générale sur ce point. En parlant du blé, il dit : « De là il résulte encore que son prix influe sur celui de tous les autres produits. Un chef d'entreprise, fermier, manufacturier, ou négociant, emploie un certain nombre d'ouvriers, qui tous ont besoin de consommer une certaine quantité de blé. Si le prix du blé augmente, il est obligé d'aug-menter dans la même proportion le prix de ses produits. » Liv. I, chap. xvii. (Note de l'auteur) 70. Même dans le commerce d’échange et sans faire usage de monnaie, une marchandise peut être chère ou à bon marché. Elle est chère lorsqu’elle est le résultat de beaucoup de frais de production, du service de beaucoup de capitaux ou d’industrie, ou, ce qui revient au même, lorsque beaucoup de capitaux ou d’industrie n’ont donné que peu de marchandise. Lorsque cette marchandise va dans l’étranger, on n’en peut donner que peu en échange de quoi que ce soit ; par conséquent elle ne trouve pas à s’y échanger facilement. C’est ce qu’on appelle ne pas soutenir la concurrence avec les marchandises produites dans ce pays étranger, lesquelles pouvant s’offrir en plus grande abondance dans les échanges, obtiennent la préférence. C’est une preuve de plus qu’il y a autre chose que des variations relatives dans les prix, comme toute la doctrine de M. Ricardo semble l’établira — J.-B. Say. 71. Lorsque, par défaut de consommation, on ne fait plus usage d’un marais salant, les frais qui ont été faits pour l’établir sont un capital perdu, un capital qui ne peut se vouer à aucune autre production. Dans les cas même, ce qui est tort rare, où l’on peut retirer, sans en perdre la majeure partie, ses capitaux d’une industrie dont les frais excèdent les produits, on ne replace pas nécessairement dans l’industrie les portions qu’on en sauve. Souvent on les prête au gouvernement ; on en achète des charges ; on les place dans l’étranger. Les travaux industriels eux-mêmes ne se déplacent pas sans pertes et sans inconvénients. Qui peut dire ce que sont deveunus les ouvriers qui travaillaient aux marais salants auxquels on a été forcé de renoncer ? Et en supposant qu’ils aient pu se transporter ailleurs et apprendre un autre métier, le revenu de leurs bras en a nécessairement souffert ; il y a eu moins de gains faits par leurs travaux industriels ; quant aux chefs de cette industrie, en supposant même qu’ils n’aient pas renoncé entièrement à une production devenue trop ingrate, ils auront du moins réduit leur exploitation ; leurs bénéfices n’auront plus été les mêmes. Ce ne sont donc pas seulement des capitaux et une industrie qui changent de place, mais des capitaux et une industrie diminués et produisant moins. J’ai donc pu dire que lorsque l’impôt est poussé trop loin, il y a des pertes de jouissances et de revenus dont le gouvernement ne fait pas son profit. L’impôt prive aussi quelquefois complètement les consommateurs de certains produits que rien ne remplace. Sans les impôts on pourrait se procurer en Angleterre les vins communs du midi de la France pour quelques sous par bouteille. Le peuple d’Angleterre est totalement privé de cette boisson salubre. Lorsque, par suite d’une prohibition ridicule, le sucre valait en France 5 à rembourser la dette que de l’accroître. Mais Hamilton et Ricardo ont creusé ce sujet jusqu’au fond, et y ont fait pénétrer une lumière à laquelle désormais aucune fallacieuse doctrine né saurait résister. M. Ricardo, avec une sagacité admirable, réduit ici l’a question à ses termes essentiels. Contracter une dette, c’est se charger d’un fardeau dont la banqueroute elle-même ne saurait vous libérer, puisque son effet ne serait pas d’augmenter les revenus des particuliers de tout ce que l’impôt lèverait de moins ; mais-seulemeut d’augmenter les revenus des contribuables (qui ne paieraient plus cette portion de l’impôt) aux dépens des rentiers (qui ne la recevraient plus). Et quel est l’effet de ce fardeau inévitable ? de rendre plus dure la condition des habitants du pays, de les exciter à secouer cette importune charge sur les épaules de leurs concitoyens en s’éloignant, en se soustrayant par l’émigration aux privations, aux gênes, aux frais qui résultent de la dilapidation antérieure d’un grand capital. Il prouve que le remède à ce mal ne peut venir que de la restitution de ce capital ; mais pour restituer un capital, il faut l’accumuler lentement en dépensant chaque année moins qu’on ne reçoit. Or, tout homme de bon sens se demande de qui l’on peut attendre cette sage conduite : sera-ce d’un gouvernement intéressé à dépenser, à multiplier le nombre de ses salariés pour multiplier ses créatures? sera-ce de ces salariés eux-mêmes intéressés à conserver leurs places et leur faveur aux dépens des contribuables ? ou bien sera-ce d’une représentation nationale forte et indépendante, intéressée à ménager la bourse du peuple, qui est la sienne ? — J.-B. Say. 77. « L’industrie manufacturière augmente ses produits à proportion de la demande, et les prix baissent ; mais on ne peut pas augmenter ainsi les produits de la terre, et il faut toujours un haut prix pour empêcher que la consomma-tion n’excède la demande. » Buchanan, tom. IV, pag. 40. Est-il possible.que que M. Buchanan puisse soutenir sérieusement que les produits de la terre ne peuvent être augmentés quand la demande eu devient plus considérable. (Note de l’Auteur.) M. Buchanan supposé, je pense, que la tendance qu’a la population à devancer lès moyens de subsistance (V. les raisons irrésistibles qn’en donne Malthus), établit une demande telle, que le prix des subsistances excède toujours ce qui serait rigoureusement nécessaire pour payer les seuls profits du capital et de l’industrie employés à la culture des, terres.C’est cet excédant qui compose le profit du propriétaire foncier, la rente qu’un fermier, consent, à payer, même lorsqu’il n’y a aucun capital répandu sur la terre qu’il loué. Le prix des produits territoriaux, comme tous autres, est toujours fixé eu raison composée de l’offre et de la demande ; or, il est clair que dans le cas dont il est ici question, la demandé n’étant jamais bornée, et l’offre l’étant toujours (puisque l’étendue des terres cultivables l’est), le produit des terres doit être à un prix monopole, qui s’élève d’autant plus, que les facultés des consommateurs s’augmentent. Il ne faut pas dire que la quantité des terres cultivables n’est pas bornée tant qu’il en reste d’incultes. Si les produits possibles des terres actuellement incultes, soit en raison des difficultés provenant de la distance ou des difficultés provenant des douanes,doivent revenir plus chers au consommateur que le blé qu’il achète au prix monopole de son canton, il est évident que ces terres ne peuvent point, par leur concurrence, faire baisser le blé dans son canton. J’avoue d’ailleurs que je ne vois aucun motif suffisant de renoncer à l’opinion de Smith, qui régarde la terre comme un grand outil, une machine propre à faire du blé, quand elle est convenablement manceuvrée, et qui trouvé tout simple que le propriétaire de cette machine, à quelque titre qu’il la possède, là loue à ceux qui en ont besoin. C’est le besoin qu’on a des produits qui est la première source du prix qu’on y met. Si la concurrence des producteurs fait baisser ce prix au niveau des frais de production, ce n’est pas une raison pour que les propriétaires de terres réduisent leurs prétentions au niveau de rien ; car, quoique les fonds de terre n’aient rien coûté dans l’origine, l’offre de leur concours est nécessairement borné, et les bornes de ia quantité offerte sont aussi l’un des éléments de la valeur. — J.-B.Say. 78. J’aurais voulu que le mot profit eût été supprimé. Il faut que le docteur Smith croie que les profits des fermiers de ces vignobles précieux sont au-dessus du taux ordinaire des profits. S’ils ne l’étaient pas, ils ne paieraient point l’impôt, à moins qu’il ne leur fût possible de le rejeter sur le propriétaire ou sur le consommateur. (Noté de l’Auteur.) 79. Voyez la note précédente. 80. Tom. III, pag. 355 81. J’ai distingué dans mon Économie politique les profits du fonds de terre des profits du capital employé à sa culture ; j’ai même distingué, en parlant de ce capital, celui qui a été employé par le propriétaire en bâtiments, en clôtures, etc., de celui du fermier, qui consiste principalement en bestiaux et en avances de frais de culture. Le premier capital est tellement engagé dans la terre à laquelle il a été consacré, qu’on ne peut plus l’en séparer : c’est une valeur ajoutée à la valeur du sol, et qui en subit toutes les chances, bonnes ou mauvaises ; Lorsqu’on est forcé d’abandonner la culture d’une terre, on est forcé d’abandonner les irrigations, les clôtures, et même la plupart des bâtiments qu’on avait faits dans la vue de l’exploiter. Cette portion du capital est donc devenue fonds de ferre. Il n’en est pas de même des bestiaux et des avances de frais ; on retire ces dernières valeurs, on les emploie ailleurs quand on abandonne un fonds de terre. C’est ordinairement cette portion du capital qui appartient au fermier, et qui se retire lorsqu’elle ne rend plus des profits ordinaires. Or, je dis que lorsqu’une terre est directement ou indirectement grevée d’impôts, ce n’est pas le profit de l’industrie et du capital du fermier qui en supporte le faix, parce qu’alors ses talents, ses travaux et son argent, qui se sont mis en avant pour un métier où l’on gagnait autant que dans tout autre, cæteris paribus, abandonneraient une terre qui ne leur offrirait plus que des profitsùnfé-rieurs, s’il fallait en déduire de nouvelles charges. Dès lors, au premier renouvellement de bail, il faudrait bien que le propriétaire baissât le prix de son bail ; autrement il né trouverait point de locataires. En supposant que l’impôt montât de cette manière, jusqu’à ravir au propriétaire la totalité du fermage, du produit net, je ne vois pas que le fermier, quelque inférieure que fût la qualité des terres, quelque coûteuse que fût la culture, y perdît encore rien, puisqu’il a dû s’arranger pour en être remboursé par les produits avant d’en payer un fermage. M. Ricardo me semble demander sur quoi il retiendra le montant de l’impôt dont il fait l’avance, lorsqu’il n’a point de fermage à payer. Mais je n’appelle du nom de fermage ou produit net d’une terre que ce qui revient au propriétaire après que l’impôt est acquitté ou retenu par le fermier. Que si l’impôt ne peut être payé, même avec le sacrifice de tout le produit net ; si le fisc veut avoir encore de plus une portion du profit du capital et du profit industriel du fermier, il est clair que celui-ci quitte la partie, et que nul autre ne voulant prendre sa place pour travailler avec trop peu de profit, ou sans profit, la terre reste en friche. M. Ricardo peut dire qu’un certain nombre de terres, à commencer par les qualités les plus mauvaises, devant toujours se trouver dans ce cas, une extension d’impôts doit toujours faire abandonner quelques cultures, diminuer par conséquent la quantité de blé portée au marché, ce qui en fait hausser le prix ; or, du moment que le prix hausse, c’est le consommateur qui paie l’impôt. Je réponds, avec Adam Smith, qu’un système durable d’impôts insupportables agit à la manière d’un climat inhospitalier, d’un fléau de la nature : il contrarie la production, et la production des substances alimentaires contrariée entraîne la dépopulation. Le défaut de population excède souvent même, par des causes que découvre l’économie politique, mais qui ne peuvent être développées ici, le défaut dé production des aliments. C’est ainsi que la dépopulation de l’Égypte à excédé le déclin de son agriculture. Il ne faut donc pas être surpris si des terres qu’on laisse en friche ne font pas monter le prix du blé. — J.-B.Say. 82. Voici l’état actuel de cette législation célèbre que la famine et une crise sociale menaçante viennent de naturaliser en Irlande. Les distributions à domicile ont été supprimées, et cette défense ne fléchit que dans certains cas exceptionnels , où des secours ; habilement distribués peuvent servir à compléter au dehors des salaires insuffisants, et à éviter l’encombrement du Work-house. Il n’est donc plus question ici de mendicité, ni de vasselage, ni d’aumônes dédaigneusement versées par la main du riche : il y a rémunération accordée par la paroisse à des hommes qui lui consacrent leurs efforts, leur temps. Dans te fait, les ateliers de charité, que recommandait déjà l’acte de la 43e année du règne d’Élisabeth, et que les gouvernements modernes se hâtent d’ouvrir aux époques où s’agite le lion populaire, affamé et irrité; ces ateliers, qui n’ont, d’ailleurs, reçu d’organisation définitive qu’en Angleterre, font pour le travail ce que les greniers d’abondance font, ou sont censés faire, pour les subsistances. Ils tiennent de la main-d’œuvre en réserve, et peuvent être appelés des dépôts de salaires. Quand le travail se ralentit dans les manufactures, le flot des ouvriers que la grève jette inoccupés dans les villes et dans les champs, se dirige sur les Work-houses, y pénètre et y séjourne jusqu’au moment où les capitaux redevenus abondants font mouvoir de nouveau les cent bras des machines. Alors le reflux commence, et ce sont les ate liers de charité que désertent les travailleurs. Comme agent économique, ce système présente donc des avantages incontestables, car il pose sous l’édifice manufacturier des étais solides et puissants : — comme agent moralisateur, il est peut-être plus recommandable encore. Ainsi l’indigent peut entrer tête haute dans ces asiles où l’attendent, s’il est vigoureux, du travail et des salaires ; s’il est vieux et infirme, des soins, du repos, des salles spacieuses où se réchauffent ses membres glacés ; s’il est enfant, le lait de nourrices émérites, et ces nids tapissés de linge blanc’et qu’on appelle, crèches. Adulte, il reçoit le prix de son œuvre actuelle ; vieillard, le prix des richesses qu’il a préparées et semées pour les générations nouvelles ; enfant, le prix de son travail futur, et peut-être de son génie. Sous le double rapport de la régularisation du mouvement industriel et de la dignité humaine, les Work-houses sont donc une institution salutaire en principe, salutaire en fait; et, s’il est arrivé souvent, comme à Andover, comme en d’autres districts, que l’État ait fait payer cher aux renouvelées, et qui, par conséquent, n’augmentent point le revenu réel du propriétaire. (Note de l’Auteur.) 84. « Le commerce nous permet d’aller chercher une marchandise dans les lieux où elle existe et de la transporter dans d’autres lieux où on la consomme. Il nous donne donc les moyens d’accroître la valeur d’une marchandise de toute la différence entre les prix courants de ces différentes localités. » — J.-B. Say. Cela est parfaitement vrai. Mais comment se crée cette valeur additionnelle ? En ajoutant aux frais de production : 1° les frais de transport ; 2° les profits afférents au capital avancé par le marchand.—La marchandise indiquée par l’auteur haussera de valeur par les raisons mêmes qui font hausser celle de tous les autres produits, c’est-à-dire par le surcroît de travail consacré à leur production et à leur transport, avant qu’elles atteignent le consommateur. Il ne faut donc pas considérer ceci comme un des avantages qui naissent du commerce. En examinant cette question de plus près, on trouve que les bienfaits du commerce se réduisent à nous permettre d’acquérir, non des objets plus chers, mais des objets plus utiles. (Note de l’Auteur.) 85. On trouve dans le dernier volume dû Supplément à l’Encyclopédie britannique, à l’article : Du commerce et de la législation des céréales, les excellentes observations qui suivent : « Si à une époque future nous devons revenir sur nos pas, il faudra, pour favoriser le passage des capitaux des terrains pauvres à des industries plus lucratives, agir au moyen d’une échelle décroissante de droits. Ainsi on pourrait abaisser annuellement de 4 à 5 sch. par quarter, le droit de 80 sch., qui est actuellement la limite où commence la libre importation des céréales.’Arrivé à 50 sch., on ouvrirait les ports en sécurité, et le système restrictif pourrait être à jamais aboli. Quand ce salutaire événement aura été accompli, il ne sera plus nécessaire d’entrer, par voie de législation, en lutte avec la nature. Le capital et le travail du pays sedirigent sur les branches d’industrie qui répondent le mieux à notre situation géographique, à notre caractère national, ou à nos institutions politiques. Le blé de la Pologne, les cotons de la Caroline s’échangeront contre les produits de Birmingham et lés mousselines de Glascow. Le véritable génie du commerce, celui qui assure à jamais la prospérité d’un pays, est complétement incompatible avec les allures clandestines et timides du monopole. Les peuples de la terre étant comme les différentes provinces du même royaume, doivent retirer de la liberté illimitée des échanges d’immenses avantages locaux et généraux. » Tout cet article de l’Encyclopédie britannique mérite une attention sérieuse : bien écrit, savamment pensé, il dénote chez l’auteur une connaissance profonde du sujet. (Note de l’Auteur) 86. Tout le capital engagé dans la terre, quelle que soit d’ailleurs son importance, doit, à l’expiration du bail, rester au propriétaire, et non au fermier. La rémunération accordée au propriétaire pour l’usage de ce capital lui reviendra toujours sous forme de rente; mais cette rente elle-même cesserait du jour où, avec une quantité donnée de capital, on pourrait récolter sur des terres éloignées plus de blé que sur celles où ont été versés les capitaux. Si la situation du pays exige l’importation de céréales étrangères, si, avec la même somme de frais, on peut récolter 1100 quarters, au lieu de 1000 quarters, il se formera nécessairement alors une rente de 160 l. st. Mais si au dehors on obtient 1200 quarters, la culture indigène sera abandonnée, car elle ne donnera même plus le taux général des profits. Mais quelque forts que soient les capitaux engagés dans la terre, il ne faudrait pas voir dans tout ceci un inconvénient bien grave. Tout capital qu’on dépense aboutit ou doit aboutir à une augmentation de produits : — il est essentiel de ne pas perdre de vue cette considération fondamentale. Qu’importe, dès lors, à la société que la moitié de son capital, ou même que la totalité de ce capital s’anéantisse, si l’on en retire un produit annuel plus considérable. Ceux qui déploreraient la perte du capital dans des cas pareils, me sembleraient sacrifier la fin aux moyens. (Note de l’Auteur.) 87. Adam Smith dit « que la différence entre le prix réel et le prix nominal des » denrées et du travail, n’est point un objet de simple spéculation, mais peut, au » contraire, être quelquefois très-utile dans la pratique. » Je suis de son avis; mais lé prix réel du travail et des denrées ne peut pas plus être déterminé par leur prix en marchandises, qui est la mesure réelle adoptée par Adam Smith, que par ce qu’ils valent en or ou en argent, qui est la mesure nominale. L’ouvrier ne reçoit un prix réellement élevé pour son travail, que quand avec son salaire il peut acheter le produit de beaucoup de travail. (Note de l’Auteur.) 88. M. Say (Écon. polit., liv. I, chap. II) conclut que l’argent a aujourd’hui à peu près la même valeur qu’il avait sous Louis XIV, « parce que la même » quantité d’argent achète la même quantité de blé. » (Note de l’Auteur.)br/ > Dans un autre endroit de mon Économie politique, je donne les raisons qui me font croire que, bien que la valeur d’aucune espèce de choses ne soit invariable, la valeur du blé est sur un grand nombre d’années communes la moins variable de toutes. — J.- B. Say. 89. La valeur est une qualité inhérente à certaines choses ; mais, c’est une qualité qui, bien que très-réelle, est essentiellement variable, comme la chaleur. Il n’y a point de valeur absolue, de même qu’il n’y appoint de chaleur absolue ; mais on peut comparer la valeur d’une chose avec la valeur d’une autre, de même qu’on peut dire qu’une eau où l’on plonge, le thermomètre, et qui le fait monter à quarante degrés, a autant de chaleur apparente que tout autre liquide qui fait monter le thermomètre au même dégré. Pourquoi la valeur est-elle perpétuellement variable? La raison en est évidente : elle dépend du besoin qu’on a d’une chose qui varie selon lés temps, selon les lieux, selon les facultés que les acheteurs possèdent; elle dépend encore, de la quantité de cette chose qui peut être fournie, quantité qui dépend elle-même d’une foule dé circonstances de la nature et des hommes. La valeur ne peut être mesurée que par la valeur. Si l’on entreprenait de mesurer la valeur des choses par une autre de leurs propriétés, ce serait comme si l’on voulait mesurer leur poids par leur forme ou parleur couleur; mais toute valeur étant essentiellement variable, aucune n’a la qualité nécessaire d’une mesure ;l’invariabilité. Aucune ne peut donc servir à donner une idée exacte d’une autre valeur qui est dans un autre temps ou dans un autre lieu. On ne peut pas dire qu’une chose qui a coûté deux.guinées à Londres, vaut le double de celle qui a coûté Une guinée à Paris, parce que la guinée, lorsqu’elle est à Paris, ne vaut pas ce qu’elle vaut à Londres. On ne peut même pas dire, qu’une chose qui valait à Londres, il y a dix ans, une guinée, a conservé sa même valeur, parce qu’elle s’y vend encore une guinée; car il faudrait pour cela avoir la certitude que, dans Londres même, une guinée ne vaut ni phis ni moins que ce qu’elle valait il,y a dix ans. Or, cette certitude, on ne peut l’avoir. Rien n’est donc plus chimérique que de vouloir proposer une mesure des valeurs et un moyen de comparer deux valeurs, à moins que ces deux valeurs ne soient en présence. Alors, en effet, on peut les comparer : chaque chose a son prix courant, qui est là valeur que les circonstances du moment y attachent en chaque lieu. On peut donc dire qu’en un lieu, en un moment donné, une chose dont le prix courant est de cinq, dix, cent fois le prix courant d’une autre chose, vaut cinq fois, dix fois, cent fois autant que cette dernière. Alors toute espèce de chose peut servir de point de comparaison pour estimer la valeur d’une autre chose, pourvu que l’une et l’autre aient un prix courant. On peut donc dire qu’une maison vaut aujourd’hui cinq cent mille hectolitres de blé, aussi bien que 20,000 francs ; et si nous disons de préférence 20,000 francs, c’est parce que nous connaissons mieux en général la valeur de 20,000 francs, que celle de cinq cent mille hectolitres de blé, quoiqu’elle soit la même dans le cas supposé. En raisonnant sur l’Économie politique, on est obligé bien souvent de considérer un même objet à deux époques successives, comme lorsqu’on recherche 90. Toute cette doctrine est puisée dans mon Traité d’Économie politique (liv. II, chap. iv), mais l’auteur en tire une conclusion opposée, c’est-à-dire que la richesse n’est pas la même chose que la valeur, tandis que j’établis que la richesse n’est que la valeur des choses. Ce qu’il y a de singulier, c’est qu’Adam Smith dit dans une circonstance comme Ricardo, et dans beaucoup d’autres circonstances, comme moi. On sent bien que des auteurs d’un si grand sens, et accoutumés à ne juger que d’après l’observation, ne peuvent être divisés sur ce point essentiel que par un malentendu ; or, c’est ce malentendu qu’il faut éclaircir. Que la richesse n’est autre chose que la valeur courante des choses qu’on possède, c’est un point de fait. Lorsqu’on veut connaître ses richesses, on fait un état général de tout ce qu’on possède ; on met à la suite de Chaque article le prix qu’on en pourrait tirer si l’on voulait s’en défaire ; et le total compose la richesse qu’on a voulu connaître. Mais il ne faut point perdre de vue les propriétés inhérentes à la valeur, parce que ces mêmes propriétés sont inhérentes à la richesse, qui n’est autre chose que de la valeur. Ces propriétés sont 1° d’êtrevariables, ainsi que je l’ai dit dans ma précédente note : un inventaire n’indique une somme de richesses que pour le temps et le.lieu où il est dressé. Dès te mois suivant peut-être, plusieurs prix auront varié, et il ne sera plus exact. Ces prix sont différents dans la ville voisine ; si l’on s’y transporte avec ses richesses, elles ne seront plus exactement les mêmes. En conclure que ce n’est pas de la richesse, ce serait vouloir conclure que la chaleur n’est pas de la chaleur, parce qu’il fait frais le matin et chaud à midi. Ces propriétés sont encore, 2° d’être relatives : c’est-à-dire que dans l’inventaire supposé, si l’évaluation totale de la propriété s’élève à 100,000 francs, Cela ne veut dire autre chose, sinon que la valeur de tous ces objets est égale à la valeur qu’ont, dans le même endroit, vingt mille écus de cinq francs pesant chacun vingt-cinq grammes au titre de 9/10 d’argent fin. De ce que le rapport entre la valeur des effets et la valeur des écus peut cesser d’être la même, il ne s’ensuit pas encore que la valeur ne soit pas de la richesse ; il s’ensuit seulement que dans le moment de l’évaluation telle richesse en effets est égale à telle richesse en argent. Si les effets viennent à baisser de valeur, ou si l’argent devient plus précieux, le rapport ne sera plus le même ; il en résultera seulement que le possesseur des effets sera moins riche par rapport au possesseur de l’argent, ou celui-ci plus riche relativement à l’autre. Maintenant, avec ces données, essayons de résoudre la grande difficulté. Comment se fait-il que lorsqu’un objet devient plus abondant, lorsque les bras, par exemple, tombent à moitié
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